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Carnet de chansons 1

Aujourd'hui, je vous propose deux textes issus des carnets bisolaires, qui m'ont servi de support à l'écriture des chansons "Vente diable" et "Phosphène", figurant sur mon dernier album Phosphène, paru en mai 2023.

J'ai également eu l'occasion, sur scène, d'en faire la lecture avant d'interpréter les chansons.

 



Liste - Saint-Martin – 2022  

    

Big fish

Oiseaux tropicaux

Résidences sécurisées

Rouleaux compresseurs d’iguanes

Calanque Pinel

Les deux pieds dans l’eau

Eau cocktail menthe

 

Vents diables

Fantômes affamés

 

Station balnéaire fantôme




À propos du vent diable      

 

Philipsburg enfante des paquebots en plastique à cinq étages.

Les milliers d’occupants enrhumés par la climatisation accostent pour aller manger des hamburgers sur la plage d’en face.

Ils les accompagnent de mojitos.

Le rhum dilué leur rappelle qu’ils sont sur une île.

Ici, dans le Truman show reconstruit, tout n’est que laideur permanente.

 

Côté français le monde infernal de la tempête et des vents dévastateurs s’est imprégné du paysage.

Je ne retrouve pourtant aucune lande déprimé.

Ici, le paysage est magnifiquement dévasté.

Transat désossés entremêlés aux herbes sauvages, soufflées, les cabanes de bois, les ventres bosselés, retournées les carcasses, à la terre, aux corps des poissons.

Nous filmons la profondeur des vents à travers les portes arrachées.

Divins orifices qui laissent passer de multiples rayons de lumières argentées.

La profondeur de champs nous emmène toujours par-delà les murs, à l’intérieur d’un tableau en trompe l'œil.

 

Les fenêtres d’Orient Bay servent de reposoirs pour les sucriers, petits oiseaux des îles aux chants de paresseux.

Un morse léger et grave.

J’ai cru comprendre ce qu’ils communiquaient l’autre matin en méditant sous le palmier yucca.

 

Les iguanes tombent des arbres pendant leur sieste.

Il pleut alors des gros lézards aux cous de coq, et il pleut leurs crottes.

Le monde infernal de la tempête et des vents dévastateurs s’est imprégné de moi.

La souffrance laissée visible sur les bas-côtés, celle que les ignobles conducteurs de quads, rouleaux compresseurs d’iguanes, ignorent, est d’une grâce infinie.

 

Parfois je gis, sur un transat qui aurait subi au moins trois ouragans, un chapeau de paille sur ma tête pour cacher les idées confuses et contrastées.






















 

Route 31 Phosphène – Nancy-Paris décembre 2022          

 

Au volant Citroën

La route est solitaire

Il y a la pluie

L’orage ensuite

Les éclairs

Les lumières phosphènes

J’aurais pu vivre une autre traque

Plus humaine

Moins aquatique

Qui ne suggère

Aucune fuite

 

La route est noire striée de raies blanches clignotantes

Les sueurs survenues éclatent

La couche, la rétine

Perte de vitesse

À l’accident, je crois que j’échappe

En me solidifiant, je patine

Déjà vaincue par cette ascension horizontale

Teintée de zones industrielles

Non loin de l’aéroport

 

A cet instant

Dans ce vacarme intérieur  

Plus rien ne m’effraie

J’apprends à me cramponner

Et, je ne vais pas crever là

J’apprends à ME ramener

Avant qu’il ne soit trop tard

Épargner les enfants

De ma minuscule tragédie

 

Le métro ne marque pas d’arrêt un 31 décembre

Des stations jusqu’aux grues de la porte Maillot

Lueurs pleurnicheuses

Quand

Les cheminées des toits expirent leurs volutes de fumée

Quand soudain

Tout redevient beau 

J’aurais pu

Vivre une autre histoire

Plutôt que des trombes d’eau

Ou flétrir du papier

Pourtant

Derrière la verrière

L’instant est exact

A l’allure réparatrice

 

Le regard se pose vers la divinité indienne

Sublimes sensualités

Révélées sous des huiles alcooliques

Il y a là, un phénomène magique

Les quatre murs

Sur le ciel de Paris

Entoilé de toitures de zinc

De brumes dorées et de miroirs qui s’ensuivent

Je retiens ce que vois

Je sais que mes yeux sont maintenant habitués aux phares,

À la nuit, aux lumières phosphènes

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